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27/08/2018

Rencontre le 27 septembre avec Marthe Dobiecki et Monique Van Moerbeke

Jeudi 27/9/2018

Rencontre inédite à 17h à l'université Catholique de Lille

Marthe-dobiecki2.jpgMarthe Dobiecki-Danel – 95 ans

Marthe Dobiecki, quatrième d’une fratrie de sept filles, est la fille de Joseph Danel, grande figure du catholicisme social à l’époque d’Eugène Duthoit. Fidèle à son goût pour témoigner et raconter, elle fait l’école de journalisme de Lille de l’Université Catholique de Lille. En 1946, elle rencontre à la session des Semaines sociales de Toulouse Bernard Dobiecki, jeune homme de 23 ans, né en France d’un couple de juifs polonais, morts en déportation. Ce sera le compagnon de toute sa vie. Marthe n’a jamais cessé d’écrire. Au plus près des événements qu’elle traverse et des gens qu’elle rencontre, il lui faut raconter ce qu’elle vit et mettre en mots ses émotions, ses enthousiasmes, ses admirations autant que ses indignations ou sa foi. En juin 2017, elle fait paraitre « l’écriture au fil de ma vie ».

En duo avec Monique Van Moerbeke

 Monique Van Moerbecke.jpg(93 ans) - Portrait à lire en cliquant sur le nom

 

Les semaines sociales qui sont nées en 1904 ont aujourd’hui besoin d’écrire une nouvelle page de leur histoire !

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Lettre des Semaines sociales de France - rencontre inédite avec Monique Van Moerbeke

Rencontre inédite avec Monique Van Moerbeke à retrouver dans la lettre des Semaines sociales de France et ci-dessous

Monique Van Moerbecke.jpgMadame Monique Van Moerbeke-Trublin vient de fêter ses 93 ans et demi. A son âge, dit-elle, on a le droit de fêter un demi-anniversaire ! Et pour cause, sa vie fut une vie remplie : par le travail d’abord, qui l’a amenée, après ses études de droit sur les bancs de la Catho à Lille, à devenir avocate, profession qui, si elle est bien exercée, requiert beaucoup de travail. Puis, après son mariage avec André Van Moerbeke, géomètre expert et expert judiciaire, elle a dû faire face à la vie de couple, pour connaître un vrai bonheur. Ce qui fut assez étonnant dans le parcours de Maitre Van Moerbeke, c’est que si elle fut une des rares jeunes filles à fréquenter les bancs de la faculté de droit dès octobre 1943, elle fut une des rares jeunes femmes à participer à la session des Semaines sociales de Toulouse en 1945 puis celle de Paris et Strasbourg. La session de Toulouse, elle se souvient y être allée avec l’abbé Lehembre et d’autres étudiants : Hubert Verstraete et Jean-Pierre Franchomme.

La session des Semaines sociales de Toulouse de 1945

Le titre de la 32ème session peut apparaitre avec le recul un peu austère mais nous sommes au sortir de la guerre. Les choses sont dites : « transformations sociales et libération de la personne ». De cette session, notre jeune participante se souvient de la leçon d’ouverture du nouveau Président Charles Flory. Il succède à Eugène Duthoit, décédé l’année précédente. Ils avaient tous les deux la même classe. Elle se souvient aussi de débats passionnés autour de l’économie et des nationalisations (d’entreprises, du crédit) et également des débats sur le droit rural et la libération du monde paysan. « Ca bouillonnait et on était content d’avoir des exposés qui ne soient pas les sermons de l’église ». Les actes parus cette année-là à la Chronique sociale de France basée à Lyon, attestent du modèle historique d’une semaine entière dédiée à l’étude d’un thème. Mais avec du recul, notre jeune participante n’imagine pas que tout ce qui est dans les actes aient pu être prononcé à l’époque. « Vous vous rendez compte, ce n’est pas possible que j’ai pu écouter tout cela…». Des éléments la frappent à la relecture comme l’instauration du statut du fermage, qu’elle a connu comme avocate et comme enfant de Landrecies, terre rurale du sud du département du Nord.

La session des Semaines sociales comme un premier grand voyage

Pourquoi et comment une jeune femme se retrouve à la session des Semaines sociales de Toulouse ? De sa première année de droit à la Catho, Monique Van Moerbeke se souvient parfaitement de tous ses enseignants dans les différentes matières, notamment de Louis Blanckaert en droit constitutionnel, décédé la veille de son élection comme député MRP, et économie politique de Eric Sapey. Justement, attardons nous sur cette dernière matière et le Professeur Sapey. « On sentait qu’il vivait sa foi » souligne-t-elle. A cette époque, la guerre, les bombardements interdisent les voyages, les vacances, les soirées. Pas de télé, seule la radio. Il reste de la place pour l’amitié et les rencontres de travail. Eugène Duthoit est Président des Semaines sociales de France et doyen de la faculté de droit depuis 1925. Il sait qu’il va avoir la jeune Monique Trublin comme étudiante et comme ils sont presque voisins, il propose une invitation à la famille à venir prendre le café chez lui. La jeune étudiante se souvient de ce grand Monsieur, aux cheveux blancs taillés en brosse, en tenue impeccable. Duthoit a le Professeur Sapey comme protégé. Ce dernier vient de Lyon ou Grenoble. Et c’est lui qui est venu solliciter les parents de la jeune étudiante pour participer à la session de Toulouse. « Il a tellement bien parlé » se souvient Monique Van Moerbeke que mes parents ont donné leur accord pour aller ainsi en grand voyage…

Journaliste improvisée

Mais la jeune étudiante n’a certainement pas été sollicitée par hasard. D’abord, elles ne sont que trois jeunes femmes au premier banc au premier rang de la faculté de droit en 1943, elle est toute seule en 1945. Assise toujours sur le banc du premier rang. Elle rejoindra l’association des juristes chrétiens. Par ailleurs, dans le contexte de la libération, elle a choisi son camp. Elle participe aux réunions de la Rue Faidherbe avec des militants du RIC (Résistants d’inspiration chrétienne). Elle y retrouve Jean Catrice, André Diligent et Emile Coliche. Des figures bien connues du Nord. Sans hésiter, le groupe lui demande de faire le rapport de la session de Toulouse…pour le journal Nord-Eclair. Voilà notre jeune étudiante…apprentie-journaliste à la session des Semaines sociales de France. Son premier article ne sera pas publié, le second oui…grâce à l’aide de « vrais » journalistes. De cette tâche difficile, elle garde le magnifique souvenir d’avoir été voisine de table de Mgr Roncalli, futur Pape Jean XXIII. Elle se souvient parfaitement de son français impeccable et de son grand humour. Monique Van Moerbeke participait aussi aux cercles de la Jeunesse Etudiante Chrétienne (JEC) autour du futur Cardinal Alexandre Renard. A la JEC, se souvient-elle, il y avait un cercle pour les filles et un pour les garçons.

Des chrétiens dans et pour le monde nouveau

C’est sur ce terreau de quelques engagements déterminés que la jeune étudiante fut donc embarquée à participer à trois sessions nationales des Semaines sociales de 1945 à 1947. Elle entre très vite au barreau en novembre 1946 et est absorbée après par sa vie professionnelle. « Ce n’est pas parce que vous mettez une plaque que vous avez des clients » indique-t-elle. Elle aurait pu être candidate MRP à la libération mais elle n’avait pas encore l’âge requis de 21 ans. C’est sa maman qui fut du coup inscrite d’office. Mais la jeune étudiante avait en son temps écrit sur le vote des femmes et elle se dit heureuse qu’une femme (Dominique Quinio) ait pu prendre au XXIème siècle aux Semaines sociales de France la suite de présidents aussi éminents qu’Eugène Duthoit et Charles Flory. Elle pressent que nous sommes, non seulement à un tournant de la vie sociale mais encore à un tournant de la vie avec des questions difficiles comme le numérique qui s’invite partout. Jusque dans le quotidien de la justice qu’elle connait bien. Dans ce monde nouveau, il n’est pas aisé de faire comme hier où l’Eglise enseignait sa doctrine que les chrétiens qui la fréquentaient observaient. Mais les « sermons tarte à la crème » dit-elle, « n’arrivaient pas à transposer cette doctrine dans la vie sociale ». Or, cela a été le travail des Semaines sociales : observer la situation sociale, y réfléchir et faire des propositions. Aujourd’hui, le travail auquel doivent s’attacher les Semaines sociales est, pour celle qui garde le souvenir vivace de sessions utiles et chrétiennes, en soi gigantesque. Pensez, dit-elle, qu’il y a un problème de langage, de connaissance de toutes ces sciences nouvelles, même de philosophie nouvelle sur l’humain. « De nouvelles Semaines sociales doivent aider l’Eglise dans ce domaine, pour que les chrétiens ne soient pas étrangers à cette évolution. Peut-être que les Semaines sociales devront trouver un autre nom ou y ajouter un je ne sais quoi… ». Le message est fort pour celle qui dit simplement les choses à la lueur d’une vie où le « travail comme distraction a forgé une personnalité ». D’autant qu’aujourd’hui, on ne viendrait pas voir les parents pour « recruter » pour les sessions, les jeunes font leur choix tout seul !

Vaste défi mais message d’espérance pour celle qui avoue lire les livres du Président de son ancienne université où elle revient suivre des cours de théologie (interdits aux filles en 1945) à côté de son ordinateur. Bien oui, on ne trouve pas dans le dictionnaire tous les mots des livres de Pierre Giorgini, qui sont de son point de vue remarquables. Elle pense qu’un avenir du christianisme social passe par le fait de traduire en langage simple le monde complexe pour vos « nouvelles Semaines sociales ». Y’a du boulot ! Message transmis à toutes celles et ceux qui y croient encore et toujours.

Denis Vinckier

 

28/11/2017

sortie du bulletin des Amis d'André Diligent

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26/10/2017

Vers une identité aux multiples visages...

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Construire une Europe qui marche....à l’endroit, est-ce possible ?

espol.jpgESPOL avait invité, le jeudi 19 octobre 2017, le chef d’orchestre de la 92ème session des Semaines sociales de France pour parler…d’Europe. Accueilli par Alexis Massart, directeur de l’école, Philippe Segretain s’est prêté au format des rencontres du jeudi après-midi pour converser avec une cinquantaine d’étudiants dont une grande majorité d’étudiantes. 90 minutes où il fut question de tout ou presque. Alexis Massart avait prévenu : dans ces rencontres, ni le thème, ni la personnalité de l’invité ne sont des prétextes.

PS2.jpgPhilippe Segretain n’a pas été dans sa vie professionnelle, stricto sensu un militant de l’Europe, mais un acteur de cette espace mouvant. A l’origine de la création d’une société de transports qui s’est développée à l’échelle européenne, il a été jusqu’à présider le comité européen de l’union internationale des transports. Son job, comme il dit, était de s’assurer qu’il parlait bien au nom de l’ensemble des pays qui comptaient. Un rôle utile de tisserand.

PS.jpgPour entrer dans le sujet qu’il a choisi d’éclairer, quelle Europe voulons-nous ? (thème de la session 2017 des Semaines sociales), il rappelle d’abord que l’Europe n’est pas réductible à une frontière. Et d’inviter à la table des échanges tous ceux qui ont pris part à cette construction d’une Union européenne. Avant le second conflit mondial, Aristide Briand qui martèle en 1929 qu’entre peuples regroupés doit exister un lien fédéral et solidaire sans toucher à la souveraineté. Denis de Rougemont qui en 1946 suggère que vue de loin, l’Europe est une évidence. Puis Robert Schuman et Jean Monnet qui s’allient dans une vision de génie. Le pragmatisme économique a donné naissance en 1952 à la Communauté Européenne du Charbon et de l’Acier (CECA) et à la Communauté Economique Européenne (CEE) par le traité de Rome en 1957.

Tout a roulé ensuite, de l’entrée de la Grande-Bretagne en 1973 après référendum, l’acte unique en 1986 établissant la libre circulation, Maastricht en 1992, Amsterdam en 1999 et Nice en 2001…jusqu’au bug de 2005 : la France rejette, avant les Pays-Bas trois jours plus tard, le traité établissant la constitution européenne. En 2004, les Semaines sociales de France choisissent de « réinventer l’Europe » et personne n’imagine le score de mai 2005 : le OUI n’obtient que 45,32% des suffrages et près de 70% des Français ont voté. Le résultat sans appel fait dire à Philippe Segretain, chargé 12 ans plus tard de reprendre le sujet, qu’à l’époque « nous avons certainement voulu réinventer sans comprendre l’incompréhension grandissante ».

Cet échec est devenu comme un fil rouge pour aborder la session de 2017. Depuis 2005, de nombreux événements, du Brexit à l’affaire Catalane, montrent que quelque chose ne tourne pas totalement rond. L’Europe : une affaire d’élites ? En mars 2017 à Versailles, une initiative des chrétiens pour l’Europe (IXE) tentait de remettre les charrues dans l’ordre en rappelant les acquis européens : longue période de paix, autosuffisance alimentaire, protection des consommateurs et des travailleurs avec des règles, solidarité régionale. Par exemple dans notre région, Valenciennes a fait son métro avec les aides européennes (FEDER). Fort de cela, fort du constat des nouveaux rapports de dominant/dominés dans le monde, fort de l’attention portée à l’Afrique, ces chrétiens pour l’Europe se sont mis en quête de scénarios. La session de novembre s’inscrit dans cette démarche de recherche de ce qui n’a donc pas fonctionné pour inverser la tendance.

PS3.jpgCar l’Europe est nécessaire. Une nécessité à laquelle prend toute sa part le nouveau Président de la République Française. Le discours prononcé à la Sorbonne montre qu’il souhaite prendre des risques pour une utile remise en questions de ce qu’il considère comme une œuvre majeure de l’histoire humaine. D’ailleurs le thème était au cœur de sa campagne électorale. Philippe Segretain s’est démené pour avoir, le dimanche matin de la session des 18 et 19 novembre prochains, la Ministre aux affaires européennes comme grand témoin de cette nécessité de prendre le sujet à bras le corps. Sylvie Goulard qui a une sacrée expérience de l’Europe a récemment posé une bonne question : est-ce que l’Europe n’a pas pris l’habitude de se dégager des contraintes démocratiques ? Reformulée par Philippe Segretain : Peut-on bâtir une citoyenne européenne sur le simple fait que nous avons des droits européens ? Et une autre étroitement liée fuse : certes le marché commun, c’était l’intuition initiale mais peut-on dire que l’économie suffit ?

D’autant que par-delà les marchés, la géopolitique retrouve ses droits. L’Europe n’est plus aujourd’hui réductible à ce qui a permis son lancement. Beaucoup en conviennent : l’Europe est un espace pertinent mais comme le souligne Hubert Védrine, la souveraineté ne se négocie pas forcément au même endroit.

PS4.jpgMais ce que Philippe Segretain a pu offrir de précieux à ses étudiants du jour, ce sont les confidences d’un Pape venu d’Amérique latine qui n’hésite pas à rappeler à ses hôtes que depuis Magellan, le continent les regarde de loin ces européens. Une distance qui permettrait presque une analyse dont François ne semble pas se priver…en s’appuyant sur Emmanuel Levinas, le philosophe né en Lituanie, qui a fait ses études en Russie puis en Ukraine, avant de rejoindre l’Allemagne puis la France. François cherchant certainement à travers cette évocation à dire l’Europe parlant de Levinas. Pour Philippe Segretain, l’évêque de Rome nous rappelle que l’accueil de l’exclu n’est que l’éthique. « Ouvrir sa porte c’est avoir une demeure, comme vous avez une demeure vous êtes en situation d’ouvrir votre porte ». Et François de se faire encore plus précis : « La grand-mère a vieilli. Il faut retrouver la dynamique qui permettra les intégrations ». Il y a au regard de ce qu’ont pu faire les pères fondateurs une forme d’urgence en termes d’invention politique…

L’échange qui a suivi avec les étudiants a permis de préciser un certain nombre de points : l’impôt au service du bien commun, l’intégration de la diversité des trajectoires, les nouveaux sujets pour arriver à parler politiquement, les rencontres concrètes par-delà les frontières, l’investissement en Afrique fait par la Chine. Et Philippe Segretain qui revient d’un voyage instructif à Riga en Lettonie après avoir passé quelques jours à Berlin dans le cadre d’un voyage apprenant, confie adopter la posture d’un agnostique sur le sujet Européen. Sa seule certitude réside dans le vécu commun et le fait que ce qui réunit les peuples est plus important que ce qui les sépare. Mais le chemin sera encore long. Et de dire aux jeunes : « prenez le pouvoir et exigez des politiques qu’ils le rendent ». Une conclusion que n’aurait pas reniée Eugène Duthoit, fondateur de la première école des sciences sociales et politiques de la Catho en 1894 et qui présida les semaines sociales de 1919 à 1944.

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